C’est une histoire que tout le monde connaît et vit plus ou moins régulièrement. Quelqu’un vient vous voir et vous dit :
« J’aurais besoin d’un conseil, … ». La personne semble attendre votre avis sur la question pour prendre une décision. Justement, vous avez une idée que vous proposez. Dès le conseil apporté, la réaction est « oui mais,… ». Vous argumentez, vous illustrez, vous apportez des exemples et la réaction est de nouveau : « oui mais, … ».
Vous venez d’entrer, involontairement, dans un jeu psychologique. Votre objectif est maintenant d’en sortir.
Les jeux psychologiques finissent mal
Eric Berne, fondateur de l’analyse transactionnelle, a observé des mécanismes dans les relations interpersonnelles, qui n’apportent rien de positif et qui pourtant sont répétitifs. Au terme de l’échange, chacun repart avec du ressentiment, sans en comprendre véritablement l’origine. Pour autant ce système présente un « intérêt » puisqu’il permet de valider des croyances personnelles, sur soi, les autres ou le monde en général. Berne a nommé ces phénomènes des jeux psychologiques[1]. Ils sont relativement fréquents, répétitifs, inconscients et finissent mal car à la fin de l’entretien chaque personne éprouve un sentiment inexplicable et désagréable.
Dans l’exemple ci-dessus, le jeu psychologique est celui du « oui, mais… ». Bien sûr, tout le monde y joue. Dans un environnement professionnel, il est utile de le repérer.
Quand un collaborateur ou un collègue cherche un conseil, que demande-t-il vraiment ?
A un niveau social, la demande concerne un problème à résoudre.
A un niveau psychologique, hors champ de la conscience, la demande est d’un autre ordre. Il peut s’agir d’une attente de validation d’une idée déjà aboutie avec la nécessité de se convaincre qu’il s’agit de la meilleure possible. Cela s’apparente à une demande de prise en charge pour partager le poids d’une décision.
Dans ces circonstances, à la suite du conseil, les réactions seront : « oui mais, … ». Si cela se répète plus de deux fois, la conversation se situe dans un jeu psychologique.
Pour jouer il faut être au moins deux
Au terme du jeu psychologique, l’apporteur de conseil se sentira tout aussi désabusé que le demandeur. Chacun sa part de responsabilité dans cette histoire, y compris à l’apporteur de conseil. Pourquoi s’évertue-t-il à répondre aux « oui mais, … ». Il y a vraisemblablement un intérêt à vouloir résoudre un problème qui ne lui appartient pas. Il en tirera reconnaissance et gratification personnelle qui le convaincront de son utilité dans l’organisation.
Inconsciemment, nous rentrons dans des rôles pour jouer aux jeux psychologiques. Ici, il s’agit du « Sauveteur ». La majuscule différencie le rôle dans les jeux de celui qui consiste à, officiellement, porter secours.
Certains Sauveteurs n’attendent pas les demandes pour proposer des solutions et mettent en évidence le nom complet du jeu psychologique : « pourquoi ne fais tu pas …..oui mais,… ». « oui mais,… » n’étant que le raccourci.
Le demandeur est lui dans un rôle de « Victime ». Là encore, la majuscule différencie le rôle dans les jeux psychologiques de l’état de souffrance dans lequel se trouvent certaines personnes suite à une atteinte à leur intégrité physique ou psychologique. La « Victime » se considère démunie, incapable de résoudre son problème seule.
Peut-on conseiller sans jouer ?
Certaines demandes de conseil sont sincères et le demandeur prend ce qui lui est proposé. L’issue du conseil n‘est donc pas systématiquement dans les jeux psychologiques.
Pour ma part et pour limiter le risque, je me limite autant que possible aux conseils informatifs, conseiller sur de l’information susceptible d’aider la personne.
Une autre option pour aider sans « Sauver » est la pratique de la maïeutique, technique socratique bien connue des coachs qui consiste, par le questionnement, à amener le demandeur à prendre conscience de ce qu’il sait déjà.
[1] Eric Berne – Des jeux et des hommes – Ed Stock